
Extrait : Alba, la quête de l’absolu par Elena Martinez.
AINSI SOIT-ELLE
Le monde dans lequel nous pénétrons en naissant est
brutal et cruel et, en même temps, d’une divine beauté.
Carl Gustav Jung
Je suis née aux premières lueurs du jour, c’est ce détail
anodin qui me valut le prénom d’Alba, qui signifie aube en
espagnol. Je fus le résultat d’un moment d’égarement entre
un homme et une femme sur le drap blanc et sablonneux
d’une plage ibérique. Je fus conçue sous le regard attentif
d’une myriade d’étoiles et dans la grande constellation qui
tisse sans trêve l’étendue de son voile, j’étais déjà, en ce ciel
obscur, une étoile filante.
En venant au monde, je fus immergée dans un grand
bain de lumière puis, une fraction de seconde plus tard,
brutalement plongée dans les eaux plus tumultueuses d’une
autre réalité, la vie terrestre.
C’est de ce paradoxe entre le souvenir imprécis que je
gardais inscrit d’une vie antérieure ; un monde d’apesanteur et de connaissances et la transition avec ce monde d’oubli que s’amorça mon insoutenable quête de l’absolu.
Car nous naissons les poings fermés, prêts à livrer l’ultime combat contre l’adversité. Et puis devant le défi de toute une vie, nous tendons désespérément nos petits doigts, refusant la solitude pour affronter nos luttes perpétuelles où les rounds sont comptés.
En grandissant, ce sont nos doutes et nos peurs qui nous
mettent chaos et qui, à force de répétitions, nous font la peau.
Et pourtant, l’amour nous élève si haut et il métamorphose
immanquablement nos âmes qui prennent peu à peu leur
forme avant de prendre définitivement leur envol.
Absolu, si plein, si dense, si généreux dans sa
circularité. Absolu, qui tantôt s’avançait vers moi,
lumineux, afin d’éclairer ma destinée et qui tantôt me fuyait,
m’englobant dans son obscurité me projetant violemment
vers un passé que je souhaitais depuis longtemps révolu.
Absolu, se faisant et se défaisant sans rien perdre,
toutefois, de sa trajectoire courbe. Absolu me ramenant
inlassablement au début de tous mes commencements.
Premières respirations, premiers pas, premiers mots,
premiers espoirs, quand tout est encore possible, le rêve
indicible puisque intraduisible, sans fioritures pour
l’embellir, rien de plus que l’essentiel.